Voyage Futur - Wellen

Pouvoir voyager sans bouger est une expérience qui n'est pas aisée à vivre. Cela peut arriver avec un film contemplatif, ou un jeu vidéo. Pour certains, il est possible de faire ceci en écoutant un album. On peut par exemple penser au space rock ou à la musique psychédélique. En ce qui me concerne, c'est l'artiste Voyage Futur qui a le don de me téléporter instantanément au milieu d'un décor de sa création. Parmi les albums de l'Autrichien, Inner Sphere nous emmène au centre d'une forêt (on en a parlé ici), et Virtual Moonlight au milieu de la nuit, depuis un point de vue aux abords d'une ville. Sa dernière œuvre en date, Wellen ("vagues" en allemand), sortie en 2023, est également un album thématique. De la pochette aux effets et samples en passant par les titres des pistes, Wolfgang Möstl nous transporte ici en bord de mer, sûrement au printemps ou en été.

L'ouverture Waves nous transporte rapidement avec ses bruits de criquets, d'eau et de vent. On retrouve la patte de Voyage Futur : les simili-claviers Rhodes, les pads à la douceur caractéristique du compositeur et les arpèges apaisants sont toujours là, cette fois-ci transposés à un univers océanique.

Mais dès le second morceau, l'Autrichien nous dévoile l'évolution qu'il a entreprise. Azurit, et d'autres titres après lui, sont bien plus percussifs que ce à quoi le musicien nous a habitué. Tout comme les percussions, les synthés utilisés sont eux aussi plus secs, frappants.

Wellen, bien que présentant des facettes avec un calme semblable à celui de ses prédécesseurs, se révèle vite plus expressif. D'une manière, il est plus expansif et démonstratif. Par vagues, les synthés s'empilent parfois pour nous submerger de sons. On ne se retrouve pas sur une piste de Devin Townsend non plus, mais comparée aux autres sorties de Voyage Futur, la houle des instruments peut parfois surprendre et nous dépasser un peu, comme sur Kristall Riviera.

Wolfgang n'a pas pour autant laissé tomber ce qui l'identifie. Lost Garden et d'autres pistes sont de véritables havres de paix, comme si on venait s'abriter du vent derrière les arbres au bord de la mer, alors que le soleil laisse doucement sa place au crépuscule. On sent d'ailleurs cette avancée de la nuit sur le jour au long du disque. Les ambiances se font de plus en plus nocturnes : l'air se rafraîchit, les criquets et oiseaux cèdent leur place au seul vent d'un soir d'été, l'auditeur contemplant désormais l'horizon océanique, puis plus tard le ciel étoilé (Moving With The Stars).

Le thème de la vague peut également se retrouver dans les spectres audios : sur Waves, Lost Garden, Hidden Lagoon, ceux-ci prennent la forme de vagues sonores. Un travail du détail appréciable, petit easter egg pour les plus curieux.

Comme sur les précédents vinyles de Voyage Futur, kldpxl s'est chargé des visuels. Si la pochette est légèrement moins marquante que ses aînées, il faut cependant admirer le pixel art présent sur les faces intérieures du vinyle. Devant un soleil achevant sa descente au-delà de l'horizon, le graphiste nous dévoile un panorama marin aux couleurs resplendissantes et à la faune et flore prospères. Une vision appelant une certaine forme de sérénité, comme lorsqu'on profite de cet album et ses paysages ensoleillés.

Alors qu'Inner Sphere et Virtual Moonlight tournaient autour des quarante minutes, Wellen dépasse légèrement les cinquante. Une durée qui lui permet de dépeindre l'évolution d'une journée au bord de la mer, depuis l'aube jusqu'après le crépuscule. Dans cet album, on ne se trouve pas au bord d'une plage bondée mais le long d'une côte éloignée de tout spot touristique. Si on peut entendre une nouvelle pointe d'excitation chez Voyage Futur, invitée par un déplacement près de l'océan, ce sont toujours ses partitions apaisantes qu'on retient. Wellen, comme toute la discographie de l'Autrichien, demeure un refuge où se reposer constitue la course naturelle des choses. À cette occasion, vous baignerez bien vos pieds dans l'eau d'un océan de son, non ?