Computers Kill People - Destruction Derby

Le rock comme exutoire

Après 12 mois pour le moins difficile, notamment pour les musiciens, il est toujours plaisant de voir de petits groupes arriver à sortir de la musique, qui plus est quand il s'agit d'une auto-production. Ce défi, le quatuor parisien Computers Kill People l'a relevé avec son troisième EP Destruction Derby sorti cette année en guise d'amuse-bouche de leur prochain album à venir. Au programme : du rock bien transpirant et chaud qui vous rappellera les temps lointains et presque fantomatiques où l’on pouvait encore aller s’entasser dans des salles de concert pour se briser la nuque avec passion.

Destruction Derby s’ouvre sur le galopant Doormat, qui nous emporte dans une cavalcade de pur desert rock. À travers ces riffs rudement efficaces et surtout cette basse ronronnante bien mise en avant dans le mix, comment ne pas s’imaginer au volant d'une décapotable, cheveux au vent (pour les personnes qui ont la chance d’en avoir, soutien au FC Calvitie) sous un soleil de plomb au milieu du désert ? L'ambiance n'est cependant pas vraiment à une musique de road trip planante, la voix éraillée de Loïc Wiels (chanteur principal et guitariste) évoquant plutôt la rudesse sans concession du rock joué par le groupe. En somme, ça sent le whisky, l'huile de moteur et la transpiration mais toujours avec panache.

Computers Kill People

Débarque ensuite la piste Dirty Habits, qui conserve la même recette énergique que le premier morceau. Cependant, on ressent également une atmosphère légèrement différente tout au long de cette dernière. Bien qu’indéniablement rock, la construction des riffs semble en effet se détacher par moments de l’effet parpaing pour se permettre d’aller chercher du côté du blues et des 70’s. Cela se remarque notamment lors des couplets ou via des jeux de réponses entre des mini soli de guitare très Black Sabbathiens sur le dernier quart du morceau. Les variations de tempos accentuent également un changement bienvenu de dynamique tout au long du morceau, alternant entre passages plus posés et reprises de refrain dans une explosion de distorsion et d’énergie. Guillaume Jannin, deuxième guitariste du groupe, vient aussi apporter un peu de lumière à la musique en mettant son timbre plus clair au service du chant principal qu’il récupère pour cette chanson.

La troisième morceau de l’EP, Nameless Mother, est quant à lui un peu à part. On peut déjà signaler que ce titre a été enregistré plus récemment que le reste de l'EP, sur lequel il n'était même pas sûr de figurer initialement. En terme de rythmique et d’identité sonore, celui-ci sonne moins écrasant et nerveux que les autres. Cela s’explique notamment par le choix d’un rythme plus saccadé et mid-tempo que les pistes précédentes et peut-être aussi par l’arrivée de Karin Gousset à la basse, remplaçant à ce poste Tony Voinchet. Au niveau du chant, les chœurs et les harmonies vocales sont plus présentes, donnant ainsi plus de coffre à l'ensemble. Mais au-delà de cette dimension purement artistique, il y a également une histoire humaine derrière ce titre. En effet, on peut noter qu’il a été réalisé en collaboration avec Medina Rekic, ancienne chanteuse et guitariste du groupe autrichien White Miles. C’est cette formation qui assurait la première partie d'Eagles Of Death Metal le soir du 13 novembre 2015 et c’est suite à cet évènement dramatique que Loïc Wiels, qui faisait quant à lui partie des spectateurs, a été mené à faire sa rencontre. Surgissant comme un rayon de lumière dans la pire obscurité que l'humanité peut produire, une belle histoire d'amitié est née, conduisant les deux groupes à se produire en concerts ensemble jusqu'à finalement aboutir sur cette collaboration.

Pour conclure Destruction Derby vient le morceau Weight of Your Love. Sonnant très blues rock, on y retrouve aussi de manière sensible les influences assumées de Queens of the Stone Age et de Monster Magnet sur le groupe. Là encore, nous sommes bercés par un rythme mid-tempo saccadé à souhait et avec des riffs efficaces faisant le boulot attendu avec brio.

En somme, ce court EP vous réservera une écoute bien sympathique, malgré le fait qu'il semble progressivement ralentir le rythme et diminuer le côté rentre dedans que l'on avait dans les deux premières pistes. On peut trouver cela un peu dommage, cependant la patte artistique de Computers Kill People reste présente tout le long de Destruction Derby, contrebalançant ainsi en apportant une cohérence sonore à l'ensemble. Cette sortie ne révolutionnera probablement pas le rock par ses riffs finalement très classiques bien qu'efficaces mais apporte en revanche quelque chose d'autant plus appréciable par les temps qui courent : le plaisir humain de se retrouver autour de notre passion commune pour la musique, les amplis saturés et surtout : le rock.

DéfouloirIndice sur l'envie de se défouler que l'on ressent en écoutant l'album. 1/5 : album plutôt tranquille, reposant et serein. 5/5 : album rempli d'énergie on a envie de sauter partout et de rentrer dans le moshpit
FraîcheurIndice de l'apport de neuf que fait cet album. 1/5 : l'album réutilise les codes du genre et fait une bonne soupe avec de vieux pots. 5/5 : l'album invente et innove son style musical
DélicatesseIndice de la douceur de l'album. 1/5 : l'album est assez sec. 5/5 : l'album est un champ de coton
Consigne du maître nageur :
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Slip de bain

Destruction Derby - Computers Kill People
Computers Kill People
"Destruction Derby"