Au milieu d'albums anodins se trouvent parfois des chansons à la qualité indéniable, trésors sous-marins dont les oreilles attentionnées entendent l'appel. En d'autres occasions, ces perles sont des singles perdus au fond de l'immense océan musical, lâchées discrètement par des artistes inconnus du grand public. Tout comme nos Passages surlignent des instants impactant d'un titre, cette chronique veut faire remonter à la surface ces morceaux à côté desquels on serait passé. Et nous savons que la Prise du jour sera bonne.
Notre vie d'auditeur est jonchée d'évènements permettant de ranger dans notre pokédex le plus de genres musicaux. Certains seront approfondis quand d'autres seront traités de manière superficielle par manque de temps ou d'intérêt. L'occasion ici d'aller dans les territoires Doom avec Pallbearer, quatuor majeur de la dernière décennie.
Il ne s'agit pas de la première incursion du groupe sur ce site, vous ayant préalablement présenté l'excellent Forgotten Days sorti en 2020. Mon amour de Pallbearer ne remonte pas à cette sortie mais à celle de Foundations of Burden en 2014, période où je plongeais doucement mais surement dans les univers du Stoner rock et de ses dérivés. Si Mars Red Sky a été ma porte d'entrée vers cet univers fuzzé, ce sont bien les Arkansasais qui furent les premiers à me donner le goût du Doom. Sauf qu'à l'époque, je ne savais pas que je m'immisçais dans un type de Doom particulier, plus mélodique et aérien que d'autres formations. Dans ses changements de rythme ou de structure, on peut même retrouver des pointes prog, qui seront plus développées dans les successeurs de ce second opus. Ce disque rentrera assez vite dans mon panthéon personnel, porté par deux titres phares : Worlds Apart et The Ghost I Used To Be.
Redécouverte
Notre parcours d'audiophile est rempli de challenges et autres bouleversements. De quoi modifier allègrement l'écoute de certains disques, dans le positif comme le négatif. Des albums adorés peuvent devenir fades et certaines pistes oubliées peuvent s'éclairer et se transformer au gré des découvertes faites par l'âge. C'est dans cette deuxième catégorie que nous allons partir avec Ashes. Cachée en fin de tracklist, cette petite sucrerie vient offrir un oasis de douceur aux auditeurs après quatre morceaux plutôt costauds.
Pendant de nombreuses années, cette chanson m'était passée au-dessus. Et puis, depuis quelques mois, mes écoutes sont allées vers des territoires plus Folk et doux. Avec ce nouvel éventail de sonorités s'offrant à moi, Ashes s'est révélée comme une pépite enfouie qui mérite autant de lumière que ses consœurs. Les claviers Rhodes viennent attraper l'oreille avec subtilité et surprise tandis que la voix de Brett Campbell arrive sans aucune forme de violence. Pendant trois minutes et dix-neuf secondes, le quatuor s'élève, sans pour autant oublier la noirceur du Doom qui ici, s'exprime à 100% dans les paroles, mais aussi dans l'ambiance globale, la quiétude instrumentale n'étant que de façade.
Enshrined in smoke, our shadows wait
Drifting through the ashes
Then souls set free amidst the gray
Lifted through the ashes
Chaque écoute de cette piste m'offre un certain apaisement, de part ses claviers et son ambiance éthérée. Surtout, le changement brusque offert vis à vis du reste de la tracklist en fait un moment suspendu agréable. Sans mes aventures vers d'autres territoires musicaux, peut-être que cet Ashes serait resté au rang de piste oubliée, comme tant d'autres dans l'histoire de la musique. La preuve que nos goûts évoluent avec l'âge et que mûrir n'est pas réservé qu'aux fruits et légumes. Qui sait quelles autres prises tomberont dans mes filets dans les prochaines années, au fil de redécouvertes fortuites. Au moins, j'ai quelques années devant moi avant de redevenir poussière.