Le Passage #22 : Brutus - Sugar Dragon

Une émotion communicative

Au fil de nos écoutes, certains albums et certaines pistes parviennent à capter notre attention. Des morceaux qui reviennent régulièrement dans nos playlists, nos oreilles, pour combler les moments creux ou tout simplement nous faire du bien. Dans Le Passage, nous revenons sur ces chansons qui rentrent dans notre panthéon, grâce à une partie qui les font surnager au-dessus des autres.

S'il est appréciable d'avoir un coup de cœur immédiat pour un titre voire un album, il peut arriver que l'amour arrive avec le temps. Soit à force d'écoutes, soit par un évènement déclenchant une forte attache. Dans le second cas de figure, le live peut amener cette péripétie nécessaire à notre histoire.

Certaines formations ont cimenté leur réputation via leurs performances sur scène et le trio belge Brutus rentre dans cette catégorie. Si ses albums sont emplis d'une forte émotion, ses concerts amplifient les sentiments ressentis, notamment grâce à Stefannie Mannaerts, portant la double casquette de batteuse/chanteuse. La voix puissante et un brin éraillée de la vocaliste sublime les moments forts à travers les albums studios et les lives.

En 2019, les Flamands osent et offrent Nest au monde, leur deuxième album. Une sortie unanimement reconnue et saluée, dont un titre figure déjà dans nos colonnes. À ce moment là, il manque de mon côté un petit quelque chose pour pleinement tomber dans l'engouement entourant le trio. Et bien que la piste War ait capturé mon cœur, il aura fallu Unison Life, sorti en 2022, pour apporter les pièces nécessaires à mon attachement au groupe.

Néanmoins, le véritable déclic arrive le samedi 24 juin 2023 dans la petite ville de Bourlon, accueillant le festival Rock In Bourlon. Un périple raconté dans nos Excursions. En tête d'affiche on retrouve Brutus pour nous emmener dans la soirée d'été de la meilleure des manières. L'impatience est de mise car les Belges sont une valeur sûre en live et on était curieux d'avoir les titres d'Unison Life joués devant nous. À mes côtés se trouve un certain Corentin, de surnom Ecafils, chroniqueur régulier de Soundbather et amoureux de la musique des Flamands.

L'émotion comme moteur

Alors que la setlist se déroule sans encombres, le trio amorce sa dernière piste de la soirée : Sugar Dragon. Présente en clôture sur Nest, elle offre un final parfait au concert. Les Belges déroulent leur musique et je sens sur mon épaule une main, solidement accrochée. En me tournant sur ma gauche, je vois Ecafils, pris par cette chanson et les yeux humides. Le titre se présente en deux parties : une première assez lente, qui va dériver vers un pont, à 3:48, offrant une montée en puissance. Le climax de tout ceci arrivant à 5:02.

Dans une explosion instrumentale, Brutus se lâche et avec lui, Ecafils. À Bourlon, mon compère s'écroule sur mon épaule, submergé par le trop-plein d'émotions ressenti lors de ce passage. Et alors que le trio, porté par les lumières de la scène, déroule la fin de ce titre, je me retrouve au milieu d'un bouillonnement de sensations rarement vécu. Alors que je n'ai pas les mêmes accroches avec ce titre que mon collègue, je débloque une case importante dans mon cerveau : celle du souvenir. Jusqu'à la fin, Sugar Dragon et cette explosion finale seront associés à Corentin et il n'est pas rare d'avoir maintenant moi aussi quelques larmes au coin des yeux quand j'écoute ce titre.

L'idée derrière ce passage n'est pas de ridiculiser Corentin mais plutôt de le remercier. En acceptant ses émotions et en les montrant, il m'a offert un moment marquant et véritablement beau. L'occasion de rappeler à tout le monde, et surtout aux hommes, que les pleurs ne sont pas un signe de faiblesse. Ici, l'instant fut tellement fort qu'il a changé ma perception d'un titre et l'amour que je lui porte. De quoi confirmer l'idée que les dragons crachent du feu, puisqu'il entretient parfaitement la flamme qui brûle au plus profond de moi à l'écoute du titre de Brutus.

Brutus_Nest_Cover
Brutus
"Nest"